mercredi 8 avril 2009

Crépuscule du fleuve


Avant de s’enfoncer dans les profondeurs de la forêt, le cerf regarde encore les larmes d’or du soleil se refléter dans l’eau sombre dont la couleur va bientôt se confondre avec les arbres déjà noirs et le château qui surplombe la rive du fleuve. Tout le long du jour, il a couru à travers bois, poursuivi par la meute des chiens dont les aboiements ponctués par le son du cor de chasse finissent par étreindre comme un étau son cœur angoissé. Aujourd’hui, il a réussi à se sauver. C’est pour cela qu’il regarde encore les reflets d’or sur l’eau presque noire, le soir au bord du fleuve. Le soleil va disparaître comme lui, un jour où vaincu par la fatigue et les morsures des chiens, il attendra le coup de grâce du piqueux qui pourrait avec sa dague – si c’était la coutume, extraire le cœur avant la curée et l’élever vers le ciel comme le faisaient les aztèques lorsqu’ils sacrifiaient leurs prisonniers au temple du soleil à partir duquel la nuit, ils observaient la voix lactée, frontière des vivants et des morts, dont la forme et sa place dans l’univers, leur donnaient à penser que c’était un pont qu’empruntaient les défunts lors de leur retour annuel sur la terre.

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